Federer le Roi infatigable, frappe de nouveau

Des records, encore des records pour le roi des courts « Rodger » Federer, avec une 8ème consécration, dans son jardin du Swiss Indoor de Bâle. La légende du tennis mondial n’a fait qu’une bouchée de ses adversaires, en disposant, tantôt de jeunes étoiles montantes, tantôt de joueurs confirmés du circuit, parmi les plus en formes du moment.

Le grand espoir du tennis mondial, le « teenager » Américain Frances Tiafoe (19 ans), fut parmi les victimes notoires, puisqu’il s’était incliné en deux petits sets 6/1 et 6/3 au 1er tour, face au virtuose Suisse. Ce jeune homme avait pourtant posé de très sérieux problèmes au Maestro, lors du 1er tour de L’US Open, en le poussant dans ses derniers retranchements, l’obligeant à disputer un 5eme set pour pouvoir progresser dans la compétition.

A Bâle, il n’a pas réussi à rééditer sa belle prestation, non pas pour cause de méforme, mais plutôt pour avoir été contraint à affronter un adversaire inaccessible, évoluant à un niveau
stratosphérique.

« …En France, par exemple, je pense qu’ils voient leurs joueurs trop grands trop vite… »

Deux Français furent aussi parmi les victimes. Ni Benoît Paire, ni Adrian Mannarino, n’avaient réussi à temporiser les ardeurs du maître du circuit. Ce dernier avait créé la polémique lorsqu’il avait taclé les médias de l’hexagone, qui selon lui, ont l’habitude de hisser le statut de leurs pros, beaucoup plus haut qu’il n’en faudrait. Mannarino avait créé la sensation l’espace d’un 1er set qu’il avait empoché, après avoir breaké Federer lors du 9e jeu, avant d’essuyer une raclée lors du 2e set, et de livrer une bataille épique le long du 1er half du set décisif, pour s’incliner in-fine avec les honneurs 6/4 – 1/6 – 3/6.

Les Français ont par contre réussi à briller de belle manière, en allant dominer les débats de l’ATP 500 de Vienne, où deux de leurs meilleurs éléments du moment, Lucas Pouille et Jo Wilfried Tsonga, se retrouvèrent en finale. Le 1er a eu raison du deuxième, sans aucun doute largement diminué par le rythme infernal qu’il s’est volontairement imposé lors de ses deux dernières semaines, avec à la clé le titre à Anvers du dimanche dernier.

En demi finale, du 3e plus grand tournoi en salle du monde, le Belge David Goffin, très bon en cette fin de saison et qui a rajouté tout récemment, deux nouvelles consécrations à son palmarès, n’a pas pesé lourd face à « Rodger », s’éclipsant en moins d’une heure sur le petit score de 6/1 – 6/2.

Les spectateurs ont eu la chance de suivre une finale d’excellente facture, entre le Maitre et l’Argentin Delpotro, qui n’a jamais été en aussi bonne forme, après son retour à la compétition en février 2016, à la suite d’une longue absence pour blessure. Le Bâlois n’a pas trop fait dans les détails, puisqu’il est entré très tôt dans le vif du sujet, en s’attaquant au service de l’Argentin, son point fort, qu’il lui pique d’entrée de jeu. Grand bagarreur comme à son accoutumé, le 17e mondial, piqué dans son amour propre, s’empare à son tour du service de Federer au jeu suivant, acceptant ainsi de défier le maître absolu, dans l’espoir de rééditer son exploit de l’US Open 2009, lorsqu’il l’avait battu en finale, s’adjugeant pour l’occasion, son 1er et unique sacre du grand Chelem.

Les débats demeurèrent équilibrés jusqu’au 9 jeu, lorsque Federer avait accéléré la cadence pour s’emparer à nouveau du service de son adversaire. A 5/4 et service à suivre pour Rodger, tout le monde s’attendait à ce que ce dernier clôture le set lors du jeu suivant. C’était sans compter avec le panache de l’homme de Tandil, celui-ci réédite sa contre-offensive du 2ème jeu et s’empare à son tour du service du maestro. C’était le tournant du 1er set, puisque l’Argentin, bien que mené 3 à 0 avec un mini break de retard lors du Tie-Break, a réussi à conclure le set en sa faveur, offrant une douche écossaise pour les 9 mille spectateurs du St Jakobshalle, tous acquis à la cause de leur légendaire favori.

Avec le poids des années et l’énergie dépensée lors de ces dernières apparitions, qui lui avait valu une deuxième consécration au Masters 1000 de Shanghai, avec à la Clé une bonne dizaine de confrontations victorieuses, j’ai personnellement douté de la capacité de Rodger, de remonter son retard après la déception du 1er set.

Mais refusant absolument de décevoir ses fans, le roi des courts se surpasse pour la énième fois de sa carrière et réussi à renverser la vapeur, en remportant les deux sets suivants, avec un panache digne des grands jours. Avec 48 points gagnants dont 19 remportés au filet, Federer à bien mérité sa victoire face à un redoutable adversaire qui n’a pas du tout démérité et dont le seul défaut est celui de s’être retrouvé en face du plus grand joueur de tous les temps, qui plus est, devant son public.

95e titre du Maestro et 7e de l’année. Le « vétéran » ne semble point impressionné par son âge et n’a jamais été (ou presque) aussi avide de consécrations. Le King de la balle jaune et porte drapeau d’une génération de joueurs exceptionnels, qui ont non seulement marqué ce sport par leur immense talent, mais également réussi à transformer les graphiques temporels de la performance, à des sommets incroyablement élevés.

Les fans du Maestro sont certainement déçus après son renoncement à disputer le grand rendez vous du Masters 1000 de Paris Bercy. Il ne faut pas trop lui en vouloir, lorsque cela est décidé pour « la bonne cause », pour préserver le Roi, dans la perspective d’une septième consécration à Londres ATP Finals.

Ces Champions qui défient le temps

Contrairement aux idées reçues, nos deux légendes Federer et Nadal ne font pas l’exception en tant que joueurs prolifiquement titrés au-delà de cette barre de la trentaine. Rien qu’en 2017, les vieux gaillards se sont accaparés la part du lion des titres mis en jeu jusqu’à fin octobre, puisque 32 d’entre eux, sont allés enrichir leur palmarès aux Federer (36 ans) et Nadal (31) bien sûr, mais aussi aux Djokovic (30), Wawrinka (32), Isner (31), Tsonga (32), Muller (34), Kohlshreiber (34), Ferrer (35), Cuevas (31), Fognini (31), Feliciano Lopez (35), Estrella Burgos (37 ans), contre 30 trophées pour leur cadets non trentenaires.

Loin les temps où de jeunes adolescents se pointaient sans crier gare, pour bousculer la hiérarchie. Des victoires aussi précoces telles que celle de Micheal Chang à 17 ans et 3 mois, à Roland Garros 1989, ou de Mats Wilander et Boris Becker au même âge de 17 ans et 9 mois, respectivement à Garros 1982 et Wimbledon 1985, ou celles de Pete Sampras à l’US Open 1990, à tout juste 19 ans, pour ne citer que ces cas, ne sont plus imaginables de nos jours.

Le tennis de plus en plus athlétique, d’année en année, ainsi que les cordages non plus en boyaux mais en matières synthétiques, ne permettent plus à de jeunes premiers de briller très rapidement, comme ce fût le cas il y a deux décennies pour leurs ainés. La transformation du management technique en une science exacte, jonglant avec les statistiques, les ratios et les algorithmes, couplée à une médecine sportive ultra moderne, dotée d’une armada impressionnante d’instruments de radiographie et de mesure, ainsi que des méthodes d’exploration fonctionnelle de plus en plus pointues, permet également de mieux accompagner les sportifs dans la performance et réussi à les faire briller en âge « avancé ».

En fouinant un peu dans les bases de données des trente dernières années, j’ai essayé de mettre au clair l’évolution temporelle chez les acteurs du haut niveau et plus particulièrement chez le Top 100 mondial. Il en est ressorti les graphiques et les constatations suivantes :

Entre 1987 et 2007, le top 20 mondial comportait annuellement une moyenne de près de deux trentenaires. La tendance s’est accrue considérablement lors de la décennie suivante (2007-2017) comme le montre la courbe de la figure 1, puisque de nos jours le top 20 comporte autant de trentenaires que de non trentenaires.

Figure 1

Même tendance dans le top 100 mondial, puisque le nombre moyen de trentenaires lors des deux décennies 1987-2007, qui était de 8.7, a explosé à presque le triple, soit 24.8 trentenaires en moyenne, (40 trentenaires dans le Top 100 actuel) (Voir figure 2).

Figure 2

La moyenne d’âge du Top 100 mondial qui était de 23.64 ans en 1987 a littéralement explosé depuis, pour dépasser les 28 ans en 2017 (figure 3).

Figure 3

Quant à la qualité des trentenaires contemporains, hormis le nombre et l’importance des titres qui plaident largement en leur faveur lors des dernières années, un autre indicateur le prouve, puisque la moyenne des points des trentenaires du Top 100, qui était largement en dessous de celle des non trentenaires jusqu’en 2010, ces moyennes ont commencé à converger pour s’égaler en 2015, pour ensuite s’envoler en 2017 au profit des trentenaires, démontrant une « espèce » encore plus présente, plus compétitive et plus performante sur le circuit que celle des jeunes joueurs.

Figure 4

Nous avons aussi d’autres cas de longévité extraordinaire de joueurs qui s’étaient particulièrement illustrés à un âge « avancé », il s’agit du Dominicain Victor Estrella Burgos (37 ans), qui a gagné la totalité de ses 3 titres ATP 250 à partir de son 35e anniversaire, le dernier en date, l’Ecuador Open de Quito en février 2017, à exactement 36 ans et 6 mois. Il a également gagné 7 titres Challenger le long de sa carrière, tous au-delà de 31 ans.

Le Croate Ivo Karlovic, recordman du nombre d’aces en carrière, avec 12278 aces et ayant détenu pendant 5 ans le record mondial de vitesse du service de 251 km/h, grâce à un service foudroyant, il a doté sa carrière d’une longévité exceptionnelle. Le plus surprenant dans la carrière de Karlovic, est le fait que 4 des 8 titres qu’il avait remporté, avaient eu lieu au-delà de son 34e anniversaire. Également 7 sur les 10 finales qu’il avait eu l’occasion de disputer avait eu lieu au-delà de son 35e anniversaire.

Cette tendance se confirme même sur le circuit Challenger. On peut citer quelques cas parmi les plus représentatifs, le 1er celui de la toute dernière double consécration de l’Espagnol Guillermo Garcia Lopez, de ses deux premiers titres dans cette catégorie, à un âge qu’on se permet de ne plus qualifier d’ « avancé », de 34 ans, qui plus est en l’espace d’ 1 mois, ce qui démontre une disponibilité exemplaire sur le circuit, que nous ne voyons que rarement chez les jeunes joueurs de nos jours.

Un autre cas que l’on peut citer, est celui de notre compatriote Malek Jaziri, vainqueur cette année à Istanbul de son 7e trophée dans la catégorie des Challengers, à 33 ans. Ce dernier a également triomphé 5 fois sur 7 au cours de sa carrière, dans cette catégorie, au-delà de la trentaine.

Les jeunes Zverev, Kyrgios, Rublev, Medvedev, Coric, Tiafoe, Nishioka, Donaldson, Khashanov, Tsitsipas, Kokkinakis, Escobedo, Fritz… ont vraiment du souci à se faire et doivent faire preuve de patiente et d’abnégation, s’ils veulent parvenir à ravir le leadership du circuit à leurs ainés.

Il est à noter que, avant la transformation spectaculaire de la dernière décennie, la haute performance à un âge avancé, n’était pas l’apanage d’un nombre important de joueurs, il n’en demeure pas moins qu’au courant de l’histoire, beaucoup de « vieux joueurs » avaient brillé de très belle manière à un âge avancé. Le meilleur exemple que nous pouvons citer, n’est autre que la légende Australienne Ken Rosewall, vainqueur de 133 titres en simple, dont 44 titres à partir de son 34e anniversaire, lorsqu’il fût avec ses compères, incorporés aux Open en 1968.

Rosewall est le détenteur de 8 trophées du Grand Chelem remportés avant 1957 et après 1968, puisqu’entre temps il avait été banni avec ses compères des rendez-vous professionnels. Il est sans aucun doute, l’un des plus grands joueurs de tous les temps, mais également le joueur le plus sous estimé. Qu’aurait été son palmarès, s’il avait eu l’occasion de disputer les tournois professionnels entre 1957 et 1968 ?

Chez nos belles dames du circuit WTA, nous ne sommes pas du tout loin du phénomène de l’explosion de la courbe temporelle que nous voyons chez leurs compères du circuit masculin. Rien qu’à voir ce qu’accomplissent les soeurs Williams, la cadette Serena aux 36 ans, ne cédant son leadership au sommet de la hiérarchie WTA, qu’au prix de la naissance de sa première fille. Et l’ainée Venus, qui n’a rien perdu de sa verve et de son tonus à 37 ans, et qui a tout le long de la saison, concouru sérieusement pour leadership mondial.

Force est de constater que les 8 meilleures joueuses de la saison, qualifiées pour le WTA finals de Singapour, ont une moyenne d’âge de près de 26 ans. Il est de plus en plus difficile d’imaginer des « adolescentes » capables de réaliser de grands exploits sur le circuit féminin, contrairement aux anciennes générations, telle que celle des années 90 et les exploits des Hingis, Seles et Graf lorsqu’elles s’étaient imposées aussi précocement à seulement 16, 17 et 18 ans, en finales de tournois du Grand Chelem. Ou aussi l’extra-terrestre Américaine Jennifer Capriati, qui s’était invitée en 1990 au Top 10 mondial à seulement 14 ans.

Toutefois, les espoirs sont encore permis avec l’avènement du phénomène Américain Cori Gauff, le grand espoir du tennis féminin, Vice Championne de l’USOpen Junior 2017 à seulement 13 ans et 5 mois.

L’heure est au décompte final après les épreuves du Masters Féminin de Singapour, la Française Caroline Garcia, moins d’un mois après ses deux sacres successifs à Wuhan et à Pékin, a confirmé sa forme du moment, et s’impose comme un membre incontournable du Top 10 mondial pour les 12 prochains mois. Après un parcours plus qu’honorable, la Française s’est inclinée en demi finale face à l’Américaine Vénus Williams. On ne peut le lui reprocher, après ses louables efforts et ses remarquables succès de ses dernières semaines.

La grande déception, fût celle du leader mondiale Simona Halep qui n’a pas réussi à se qualifier au dernier carré de la compétition. Elle s’est exposée par la même occasion à la perte de son leadership au classement WTA, 3 semaines seulement après s’en être emparée. Elle devra remercier son amie, la Danoise Caroline Wozniacki, qui a ravi le ticket pour la finale, au numéro 3 mondiale, la Tchèque Pliskova, qui l’a pour la même occasion, privé d’un retour au sommet de la hiérarchie.

Justement en parlant de Wozniacki, l’une des stars mondiales de la discipline, elle fût en 2010 à seulement 20 ans, la sixième plus jeune joueuse de l’histoire à accéder au sommet du classement WTA, mais qui avait perdu de sa verve depuis quelques années, frôlant l’exclusion du Top 100 il y a tout juste 13 mois, lorsqu’elle s’était classée 74e mondiale, diminuée il est vrai par des soucis d’ordre physiques. Depuis le début de l’actuelle saison, elle avait réussi à vaincre ses vieux démons, avec un retour progressif aux avant-postes.

Elle a bien profité de ce dernier grand rendez-vous de l’année, pour signer un retour explosif au premier plan et ce en accédant pour la deuxième fois de sa carrière, après l’édition 2010, à la dernière marche du WTA Finals de Singapour. La belle Danoise s’est permis le luxe, lors de la phase des groupes, de démolir deux joueuses suprêmes, membres du top 4 mondial. Il s’agit du leader mondiale et non des moindres, la Roumaine Simona Halep, défaite par le score humiliant de 6/0 – 6/2 et du n° 4, l’étoile montante du tennis mondial, l’Ukrainienne Elina Svitolina, qui n’a pas fait mieux que sa leader Halep et s’est également inclinée face à la Danoise, sur le score
de 6/2 – 6/0.

En finale elle a livré un match d’une autre dimension, qui lui a permit de venir à bout des ambitions de Venus Williams. Cette dernière rêvait de rajouter un dernier grand sacre à son superbe palmarès. La Belle Danoise de Odensée, remporte à 27 ans, le 1er Masters féminin de sa carrière après une première tentative ratée en 2010 face à la Belge Kim Clijsters. Elle a disposé de l’Américaine en 2 sets sur le score de 6/4 – 6/4.

Mention Spéciale donc pour l’ainée de la fratrie Williams, qui malgré les épreuves de la vie, elle continue à 37 ans à corriger des stars du tennis mondial, puisque deux de ses 3 dernières victimes ne sont autres que les vainqueurs de deux des quatre levées du Grands Chelem de l’année, en l’occurrence l’Espagnole Muguruza et la Lettone Ostapenko. L’Américaine qui avait prétendu en 2004 être en mesure de battre le Maestro Roger Federer (celui-ci avait refusé de l’affronter), a été frappée en 2011 par le syndrome de Sjögren, une déficience immunitaire chronique provoquant des problèmes rhumatismaux tels que la polyarthrite rhumatoïde.

Un vrai exemple pour les jeunes, chapeau bas pour la Championne Venus Williams, que nous espérons applaudir sur le circuit encore pour quelques années. Hormis quelques rendez-vous d’importance mineure, la saison 2017 du circuit féminin est close. Les inconditionnels du feutre jaune, attendront avec impatience le coup d’envoi de la saison 2018, avec le retour annoncé de la légende vivante Serena Williams, lors de la 1ère levée du Grand Chelem de l’année à l’Open d’Australie. Elle s’emploiera sans aucun doute à rejoindre son ex rivale Kim Clijsters, en tant que deuxième maman numéro 1 de l’histoire.

Pour le circuit masculin, les fans de tennis attendront avec impatience de voir si Federer réussira ou non à s’emparer de son 7e sacre, ou bien si ça sera la première de Nadal. Personnellement, bien que j’aie un penchant pour le Maestro, j’aimerais bien voir Nadal enrichir son palmarès avec ce titre qui lui manque trop, pour consacrer son immense carrière.

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